Le Mépris
1h43, France, Italie, 1963
avec Brigitte Bardot, Michel Piccoli, Jack Palance
Paul Javal, un scénariste français, contribue à l’adaptation de L’Odyssée par Fritz Lang. Lorsque son épouse Camille le rejoint à Rome pour le tournage du film, Paul ne tarde pas à s’apercevoir que la jeune femme s’attire les faveurs du producteur.
Godard aurait pu baptiser son film La Nuit américaine, dix ans avant Truffaut. D’abord parce qu’il précède son confrère dans la dissection du cinéma, un monde parallèle tenté d’en envahir un autre, jaloux et jalousé : la vie. Et surtout parce qu’il affirme que le cœur des hommes peut s’assombrir en plein soleil, comme on peut filmer la nuit en plein jour. Godard contemple le déclin du cinéma et de l’amour, irrémédiablement liés.
Une scène mêle à merveille ces chutes abyssales : Prokosch attire Camille vers une minuscule fenêtre, qui ouvre sur la mer, réduite à quelques centimètres carrés. Inconsciemment, le producteur balourd signe l’arrêt de mort du cinéma, remplacé par la télévision, et celui de l’amour de Camille pour son mari, remplacé par le fourvoiement infidèle. Pourtant, jamais ne pointe l’amertume. Godard est un désespéré optimiste. La magie de ses images, bercées par les plus beaux échos de violon que Delerue ait composés, prouve qu’il ne croit pas à la mort du septième art. Godard a beau cacher ironiquement le visage de B.B. derrière des branchages alors qu’elle lit un ouvrage d’art, son sens du cadrage atteste combien il sut saisir les vertus rayonnantes de l’actrice. Déesse vivante, filmée au côté de statues de l’Antiquité, elle offre son rôle le plus envoûtant, le plus énigmatique.
— Marine Landrot, Télérama
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