Ten
Abbas Kiarostami – 1h34, Iran, 2002
Avec Mania Akbari, Amin Maher, Kamran Adl, Roya Arabshahi
Ten met en scène dix séquences de la vie émotionnelle de six femmes, qui pourraient aussi bien être dix séquences de la vie émotionnelle d’une seule et unique femme. Celles-ci sont amenées à relever des défis à une étape particulière de leur vie.
Avec Ten, le cinéaste iranien se joue des contraintes qu’il s’est imposées pour parvenir à une parfaite liberté de création. Dans la voiture d’une femme de Téhéran, Mania Akbari, dont la beauté éclate sous la tenue islamique, se jouent, en dix trajets et dix rencontres – une amoureuse, une prostituée, un petit garçon... – les enjeux d’une vie, d’une société. La modestie des moyens techniques - deux petites caméras digitales fixées à l’intérieur de la voiture - est inversement proportionnelle à la richesse du résultat. D’une façon particulièrement subtile, Ten fait également figure de brûlot politique, en se mettant en infraction avec les codes d’une société iranienne qui fantasme depuis quelques décennies son retour à la pureté des origines. Le rapport à la loi y est ainsi incessamment bafoué, depuis le stationnement de la voiture en double file jusqu’aux propos incandescents de certains dialogues, en passant par l’absence des hommes adultes dans le film. Entre l’image et le son, le visible et le caché, le dicible et l’indicible, l’audible et l’inaudible, Kiarostami met ainsi en scène une érotisation du fragment, qui éclate dans chaque parcelle de peau entraperçue, dans chaque modulation du timbre de la voix, dans chaque clair-obscur balayant un visage. Ten est un film qui, de la même façon qu’il feint de reculer pour mieux avancer, soustrait pour mieux montrer.
Jacques Mandelbaum, Le Monde
Dans ce cycle
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ImageDu 11 au 19 octobreAbbas Kiarostami – 1h58, Iran, 1999
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ImageDu 9 au 12 octobreAbbas Kiarostami – 1h39, Iran, 1997
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ImageLe 18 octobreAvec Massoumeh Lahidji