Revoir Paris
Alice Winocour – 1h43, 2022
avec Virginie Efira, Benoît Magimel, Grégoire Colin
Mia est sortie physiquement indemne d’un attentat dans une brasserie parisienne, mais est régulièrement assaillie par des flash-back courts et intenses. Trois mois après le drame, elle décide d’enquêter afin de retrouver ses souvenirs et tenter de reprendre le cours d’une vie normale…
Alice Winocour, une fois encore, filme une héroïne. Comme Sarah et sa combinaison d’astronaute dans le sublime Proxima, Mia ne quitte pas sa veste de motarde, qui lui confère la carrure d’une guerrière. Ses cheveux noués en une queue de cheval serrée libèrent le visage de Virginie Efira, sa magnifique interprète, que la réalisatrice filme comme un écran sur lequel se reflète le monde. Car la beauté de Revoir Paris est de toujours savoir mettre en résonance cinématographiquement sa protagoniste et ce qui l’entoure. En tentant de retracer ce qui lui est arrivé ce soir-là, Mia ouvre les portes d’un monde qu’elle entrevoyait à peine jusqu’alors.
Ces sans-abri, ces sans-papiers de la Porte de la Chapelle ou du quartier Stalingrad sont aussi des personnages de ce film qui donne à voir un Paris à deux vitesses, où les classes sociales cohabitent sans dialoguer. Les mains aux couleurs de peau contrastées qui se serrent dans le noir sont un leitmotiv du film, un rempart puissant contre l’obscurantisme menaçant, une manière de se maintenir dans le monde des vivants. Ce qui y conduit est un remarquable travail de la lumière, signé Stéphane Fontaine. De jour comme de nuit, la vitalité de la capitale et des personnages se fait sentir par un mouvement permanent subtilement suggéré par la photographie. Si la mort rôde ici, si les fantômes peuplent la mémoire de Mia, la vie est là et bien là. En témoigne l’humour dont fait preuve Thomas, autre victime qu’incarne dans un parfait dosage de puissance et de vulnérabilité Benoît Magimel.
Revoir Paris est l’œuvre d’une hypersensible, touchée de près par les attentats du 13 novembre 2015 (son frère, auquel le film est dédié, fait partie des rescapés du Bataclan), qui a su trouver « le diamant au cœur du trauma », pour citer un psychiatre qu’elle a rencontré, et raconter comment la résilience peut opérer grâce à la force du collectif.
— Anne-Claire Cieutat, Bande à part
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