Manhunter
1h58, États-Unis, 1986
avec William L. Petersen, Kim Greist, Joan Allen
Will Graham, agent du FBI retiré depuis trois ans, était spécialisé dans le « profilage » (établissement du profil psychologique d’un criminel). Mais Crawford, son ancien collègue, le supplie de reprendre du service. Un tueur psychopathe a déjà décimé deux familles et le talent particulier dont fait preuve Graham pour débusquer ce type de criminels est indispensable à la police. Au péril de sa santé mentale, il se lance sur les traces d’un tueur en série.
Oubliez le titre français, Le Sixième sens, et pas seulement afin d’éviter une possible confusion avec le film de fantômes de Shyamalan. Manhunter entretient une autre ambiguïté : qui est le dit « chasseur d’homme » ? Le serial killer, prédateur implacable qui décime des familles aisées dans leur sommeil les nuits de pleine lune ? Ou le profiler du FBI – William L. Petersen, excellent – qui tente d’en retrouver la trace en se projetant dans son cerveau malade, au risque de s’y perdre ?
Renvoyer les deux hommes dans un jeu de miroirs où l’un et l’autre se confondent, jouer sur l’identification du flic et de sa proie, brouiller la frontière entre monstruosité et humanité, telles sont les lignes de force troublantes de ce thriller mental qui allait jeter les bases du style Mann : action, expérimentation visuelle, formalisme léché exaltant dans un bain de musiques planantes des univers urbains, nimbés d’éclats bleutés et de néons blafards. Avec cette façon aussi de distendre le récit comme pour le vider de sa substance, en l’infléchissant vers une forme d’abstraction à laquelle fait écho l’architecture moderniste des décors. Adapté du roman Dragon rouge, de Thomas Harris, où apparaît pour la première fois le personnage d’Hannibal Lecter, et réalisé au cœur des années MTV, Manhunter allie ainsi mélancolie languide, beauté irréelle des cadrages et esthétique inspirée du clip (usage du ralenti, de la répétition dans les scènes d’action). Une stylisation renvoyant le film à ce qu’il est : une traversée des apparences, où le monde déréalisé n’est plus que simulacres, surfaces, images.
— Nathalie Dray, Libération
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