First Cow

Autour de 1820, Cookie, un cuisinier, voyage vers l’Ouest jusqu’en Oregon en compagnie de trappeurs. Là, il se lie d’amitié avec King-Lu, un immigrant d’origine chinoise, venu lui aussi tenter sa chance dans ce territoire vierge. Les deux hommes développent bientôt une petite entreprise prospère mais risquée.

Ce huitième film de Kelly Reichardt, une des meilleures cinéastes américaines depuis une vingtaine d’années, possède la même vertu de suggérer beaucoup avec très peu. Sa simplicité, son épure ouvrent sur une épopée ample et puissante, aux échos multiples. C’est d’abord le récit d’une amitié masculine, mais débarrassée du virilisme convenu qui imprègne la mythologie des pionniers. […] La réalisatrice conte alors une histoire de succès à l’américaine avant l’heure, mais livre, en même temps, la critique d’un système économique fondé sur semblable réussite : c’est en cherchant à profiter d’une demande de plus en plus pressante que les deux entrepreneurs en herbe, grisés par leurs gains, risquent une vengeance fatale… « À l’oiseau son nid, à l’araignée sa toile, à l’homme l’amitié. » Cette citation inaugurale, attribuée au poète William Blake, reflète la hauteur de vue du film, qui donnera à la trajectoire de ses deux personnages un sens magnifique, au-delà de leur culpabilité et de leur innocence.
Louis Guichard, Télérama