Le Mohican

En plein coeur de l’été, Joseph, l’un des derniers bergers du littoral corse, voit son terrain convoité par le milieu pour un projet immobilier. Il refuse de céder. Quand il tue accidentellement l’homme venu l’intimider, il est forcé de prendre la fuite et devient la proie d’une traque sans répit du sud au nord de l’île.

Comme sorti d’un western de John Ford (1894-1973), Joseph, le berger, va devenir un héros, défendant à la fois ses intérêts personnels et ceux de sa communauté. Quitte à se mettre hors la loi. […] On est avec lui, l’absence de musique nous le rend plus proche. On capte son souffle, le bruit des graviers, des feuillages… […] Le truand, le berger et les touristes, quel meilleur condensé pouvait-on trouver à l’image pour résumer le drame ? Le Mohican n’est pas qu’une histoire d’assassin recherché par la police, mais la démonstration virtuose d’un équilibre rompu (économique, écologique, social), emporté par l’appât du gain. Le récit aurait pu s’en tenir là, mais, peut-être pour ne pas désespérer complètement le spectateur, Farrucci suit la piste d’un possible mouvement de résistance : celui-ci naît à l’initiative de la nièce de Joseph, Vannina (Mara Taquin), sur les réseaux sociaux. À mesure que les posts de la jeune femme se propagent, une armée virtuelle se constitue. Dans sa forme de western 2.0, le récit fait progresser, simultanément, les péripéties du berger dans ses planques successives et le soulèvement souterrain d’une foule épousant la cause du Mohican. Une belle image est trouvée pour inscrire cette lutte, quasi invisible, dans le paysage urbain, comme si le berger était tatoué dans le territoire.
Clarisse Fabre, Le Monde