La Leçon d’allemand (Deutschstunde)
Christian Schwochow – 2h05, Allemagne, 2019
avec Ulrich Noethen, Tobias Moretti, Levi Eisenblätter
Siggi Jepsen est enfermé dans une prison pour jeunes délinquants après avoir rendu copie blanche lors d’une épreuve de rédaction. Le sujet : « Les joies du devoir ». Dans l’isolement de sa cellule, il se remémore la période qui a fait basculer sa vie. En 1943, son père, officier de police, est contraint de faire appliquer la loi du Reich et ses mesures liberticides à l’encontre de l’un de ses amis d’enfance, le peintre Max Nansen, privé d’exercer son métier. Siggi remet alors en cause l’autorité paternelle et se donne pour devoir de sauver Max et son œuvre…
Jusqu’où doit-on obéir ? Et quelles sont les limites au devoir dans un régime autoritaire ? C’est au cœur de ce dilemme que se situe le beau roman de Siegfried Lenz, best-seller de l’après-guerre publié en 1968, qui renvoyait le peuple allemand aux cicatrices laissées par son passé nazi. Le réalisateur allemand Christian Schwochow (Paula, De l’autre côté du mur) s’est attelé avec sa mère, scénariste célèbre dans son pays, à l’adaptation de ce monument national, souhaitant lui donner une lecture contemporaine et universelle à l’heure où, selon le cinéaste, « les sentiments antidémocratiques gagnent du terrain », partout en Europe. Inspiré à l’auteur par le peintre Emil Nolde, interdit de peindre à partir de 1941 (malgré des sympathies nazies découvertes tardivement), et situé volontairement loin de Berlin et de tout le folklore du IIIe Reich, le roman faisait de la nature tourmentée des bords de la mer Baltique la métaphore des états d’âme de Siggi. Le film, âpre et corseté, parvient à en restituer toute la beauté symbolique et visuelle.
Céline Rouden, La Croix