Forbidden di sporgersi

Séjour théâtral dans l’imaginaire d’une autiste

Dans ses créations, Pierre Meunier a coutume d’inventer une écriture scénique, faite de mécanismes et de matière brute qui deviennent de véritables partenaires de scène pour les interprètes. Avec Forbidden di sporgersi, on retrouve cette créativité plastique faisant, cette fois, écho au texte Algorithme éponyme de Babouillec, une jeune autiste. Un spectacle – une belle rencontre – où les mots sont importants, mais où il y a aussi beaucoup à voir.

Avec sa compagnie La Belle Meunière, Pierre Meunier creuse, depuis plusieurs années, les questions de la norme, de la limite ou de l’appauvrissement de l’imaginaire. Forbidden di sporgersi, son dernier projet théâtral, entre particulièrement en résonance avec ce champ d’investigation, en donnant un univers concret à l’imaginaire de Babouillec, autiste sans parole. Mais pas sans mots.
En effet, pour communiquer avec le «dehors», la jeune auteure est partie à la conquête de sa propre voix, à l’aide de lettres cartonnées qu’elle dispose sur une feuille. C’est ainsi une langue poétique et caustique qui jaillit et vient bousculer notre perception du monde. Un exemple? Interrogée, lors de la création du spectacle, sur la pertinence d’une rubalise volante, elle répondait: «Oui pour la densité sonore du silence.» Ou encore: «Être ou ne pas être, là est la question. Dire merde à ceux qui croient savoir, là est la réponse.» Sur scène, deux comédiens, une danseuseacrobate et un guitariste incarnent l’intensité de cette matière, en évoluant au milieu d’un décor – fait de ressorts, de pneus, de cailloux – tout aussi brut que les mots de Babouillec.