Quai d'orsay
Bertrand Tavernier - 1h53, France, 2013
Avec Thierry Lhermitte, Raphaël Personnaz, Niels Arestrup
Alexandre Taillard de Vorms est grand, magnifique, un homme plein de panache qui plaît aux femmes et est accessoirement ministre des Affaires Étrangères du pays des Lumières : la France. Alexandre Taillard de Vorms est un esprit puissant, guerroyant avec l’appui de la Sainte Trinité des concepts diplomatiques : légitimité, lucidité et efficacité. Le jeune Arthur Vlaminck, jeune diplômé de l’ENA, est embauché en tant que chargé du “langage” au ministère des Affaires Étrangères. En clair, il doit écrire les discours du ministre ! Mais encore faut-il apprendre à composer avec la susceptibilité et l’entourage du prince, se faire une place entre le directeur de cabinet et les conseillers qui gravitent dans un Quai d’Orsay où le stress, l’ambition et les coups fourrés ne sont pas rares... Alors qu’il entrevoit le destin du monde, il est menacé par l’inertie des technocrates.
Dans la peau de ce Villepin pour rire, Thierry Lhermitte, bluffant, rappelle les meilleurs comédiens burlesques de l'âge d'or hollywoodien. Pendant qu'il gesticule, les membres de son cabinet s'occupent vraiment des dossiers. Dans le registre doux du gros chat épuisé qui en a vu d'autres, Niels Arestrup en chef de cabinet, à contre-emploi total de ses rôles habituels, est hilarant. De quoi ébahir le jeune Arthur Vlaminck (Raphaël Personnaz, parfait ingénu de comédie), fraîchement enrôlé par le ministre pour faire «du langage»: écrire ses discours et apprendre à caser des citations d'Héraclite dans une intervention sur... la guerre du hareng ! Un ministère, nous souffle le cinéaste, moqueur mais jamais méprisant, ce devrait être comme une bonne troupe d'acteurs : beaucoup de talents conjugués, même si, au final, c’est la vedette qu’on applaudit à l’ONU. Pour Tavernier, le jeu politique en vaut toujours la chandelle.
Guillemette Odicino, Télérama