La Cordillère des songes
Patricio Guzmán – 1h25, Chili, 2019
Les quarante-six années d’exil passées loin du Chili, où il est né en 1941, Patricio Guzmán les a vécues sans que jamais ne se dissipent les fumées de sa maison d’enfance, désormais en ruine.Il les a néanmoins traversées en revenant sans cesse dans ce pays, par la voie du documentaire politique, afin d’en rapporter l’histoire et de garder le lien avec cet endroit du monde auquel il fut arraché.
La Cordillère des songes est le dernier volet d’une trilogie sur le Chili, en proie aux fantômes de la période Pinochet. Patricio Guzmán a remué ciel et terre pour mener à bien cette quête cinématographique, où se répondent paysages, souvenirs et réflexions politiques. « Si je n’avais pas connu un coup d’État, j’aurais peut-être fait des films légers », confie Patricio Guzmán à Boris Nicot dans le documentaire Filmer obstinément. De l’obstination, il en fallait à ce cinéaste chilien exilé à Paris, pour composer depuis presque cinquante ans une œuvre aussi essentielle autour de la présidence de Salvador Allende (1970-73) et de la dictature d’Augusto Pinochet (1974-90). Depuis La Bataille du Chili (1975-79), trilogie documentaire qui demeure à ce jour le plus grand témoignage filmé sur cette période tragique, sa manière a considérablement changé, passant de l’esthétique un peu aride du cinéma direct à celle de l’essai documentaire, empreint d’une poésie qui contredit le sentiment exprimé par le cinéaste de ne pas faire preuve de « légèreté ».